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Vers une réforme de l’hébergement d’urgence ?

La ministre du Logement Emmanuelle Wargon a annoncé, lundi, une réforme de
la politique d’hébergement d’urgence, pour mettre un terme à la gestion “au coup
par coup”, en instaurant une programmation pluriannuelle en fonction des
besoins des territoires.
Dans un communiqué publié lundi, la ministre du Logement Emmanuelle Wargon
a jugé « nécessaire de mettre définitivement fin à la gestion dans l’urgence et de
construire une politique structurelle, avec une visibilité sur le long terme en lien
avec les associations », qu’elle a reçues le même jour. Depuis plusieurs années,
l’État créait des places d’hébergement d’urgence chaque hiver pour les plus
précaires avant de les refermer le printemps venu avec la fin de la trêve
hivernale. Avec la crise du Covid-19, le ministère du Logement a rompu avec cette
“gestion au thermomètre“, annonçant le 21 mai qu’il gardait les 43.000 places
d’hébergement d’urgence créées depuis le premier confinement (mars 2020)
ouvertes jusqu’à fin mars 2022 au moins. Au total, plus de 200.000 personnes
sans domicile fixe sont actuellement hébergées dans des centres d’hébergement
ou des hôtels.
Pour Jean Fontanieu, secrétaire général de la Fédération de l’Entraide
protestante, cette annonce de pérennisation est une belle avancée. « Le collectif
CAU (Collectif de 39 associations unies pour une nouvelle politique du logement
des personnes sans-abri et mal logée dont sont membres la FEP, l’Armée du
Salut, le Centre d’action sociale protestant (CASP)…) réclame cette mesure
depuis vingt ans. Elle prévoit de mettre fin à la “gestion au thermomètre”. Ce
système vise à ouvrir des places d’hébergement d’urgence en hiver et à les
fermer au printemps. Nous réclamons depuis longtemps l’arrêt de ce système. Il
faut savoir que les sans-abris meurent plus dans la rue l’été que l’hiver. »
Vers une programmation pluriannuelle de
l’hébergement
Parmi les associations reçues lundi par Emmanuelle Wargon figure la Fédération
des acteurs de la solidarité (La FAS représente 80% des gestionnaires de centres
d’hébergement d’urgence), qui réclame une loi de programmation pluriannuelle
intégrant l’hébergement d’urgence et le programme “Logement d’abord”. La FAS
est une des associations du collectif CAU. « La FAS nous représente car les 39
associations ne peuvent pas venir aux réunions avec la ministre », précise Jean
Fontanieu.
Selon le ministère, du 1er janvier 2018 au 30 juin 2021, le programme “Logement
d’abord” a permis à 280.000 personnes sans domicile fixe, à la rue ou en centre
d’hébergement d’accéder au logement. Dans une lettre adressée au président de
la FAS, Pascal Brice, Emmanuelle Wargon se dit « très favorable au principe
d’une programmation pluriannuelle de l’hébergement et du +Logement
d’abord+ ».
Selon la ministre, cette programmation « permettra d’avoir une visibilité sur le
nombre de places sur cinq ans et de prévoir, programmer, anticiper et
transformer les places en fonction des besoins des territoires et des publics ».
« La question est +comment permettre à des personnes en hébergement
d’urgence d’accéder au logement?+ et d’ainsi libérer des places d’hébergement
d’urgence », a résumé l’entourage de Mme Wargon à l’AFP. C’est tout l’enjeu de
cette proposition pour le secrétaire général de la FEP. « L’hébergement
d’urgence est une première étape. Il faudrait aussi augmenter le nombre de
constructions de logements pour faire face. 350 000 sont construits chaque
année, il en faudrait 550 000. Certaines municipalités préfèrent payer des taxes
plutôt que de construire des logements sociaux. »
La Dihal et la FAS à la manoeuvre
La ministre a chargé la Délégation interministérielle à l’hébergement et l’accès au
logement (Dihal) de poser les bases de cette programmation avec la FAS et les
acteurs du secteur, pour un rendu des groupes de travail au premier trimestre
2022.
« C’est un signal politique important (…) qui montre la volonté du gouvernement
de changer d’approche et de culture », a réagi auprès de l’AFP Pascal Brice. Il a
cependant estimé « important que ces discussions aboutissent et que les décisions
prises par le gouvernement » dès l’hiver 2021-2022 soient « conformes à cette
approche ». « C’est une démarche intéressante », a estimé le délégué général de
la Fondation Abbé Pierre, Christophe Robert. « Reste à savoir comment cette
réforme sera mise en place, quels acteurs seront associés et quel sera
précisément le public visé. »
Un avis partagé par Jean Fontanieu. « Il imagine que l’État a compris, sans doute
grâce à la crise du Covid, ce que les associations lui demandent depuis
longtemps. La crise a aussi montré qu’il était possible d’avancer avec une volonté
politique et a mis en lumière le gaspillage d’un système qui ouvre et ferme des
places dans l’année. Le président aime dire qu’il fait ce qu’il dit, il avait promis la
première année que plus personne ne dormirait dehors dans la rue sous son
mandat. Cette annonce va pouvoir aller dans ce sens. Il faut veiller à la mise en
oeuvre qui va exiger la libération de crédit », insiste le secrétaire général de la
FEP.
De son côté, la Fondation Abbé Pierre espère que « l’identification des besoins
locaux servira de base à une loi de programmation pluriannuelle », un « enjeu
d’importance dans le cadre de la prochaine élection présidentielle ».
Laure Salamon (avec AFP)